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La Martinique et le Covid

Récit d'une mission d'aide médicale contre l'épidémie de COVID

Regard d'une aide-soignante au CHU de Fort de France

Les locaux de médecine sont dans le bâtiment construit au début des années 1980. Bâtiment de huit étages, classique de cette époque, rectangulaire, avec entrée centrale vers un grand hall   et les ascenseurs au fond.

Un long corridor le relie au nouveau plateau technique triangulaire de cent mètres de côté édifié en 2017.

Marie-Neige est postée au septième étage secteur D, médecine polyvalente.

Voici son récit:

J’empreinte l'ascenseur. La porte s'ouvre et je découvre ce service à 10 000 km de mon domicile.

Que vais-je rencontrer comme patients ?

Combien de COVID,  et dans quels états ?

Aussitôt la porte franchie, mon regard par la la recherche d'une personne pour m’accueillir. Personne.

Où se trouve la salle de soins ?

La salle de change, le vestiaire ?

J'avance. C'est le week-end. Moins de personnel pour m’accueillir. Je suis seule.

Au milieu du couloir j'aperçois un chariot de soins, tout seul lui aussi. Logiquement une aide-soignante se trouve dans la chambre. Je m'approche et par la lucarne, je devine la présence de deux aide-soignantes affairées à la toilette d'une patiente allongée, nue sur son lit, visiblement très fatiguée.

Je frappe et j'entre.

- "Bonjour, je suis l'aide-soignante en renfort sanitaire.  Où puis-je m'habiller? "

- "Bonjour, c'est à cette heure là que tu arrives ? Normalement c'est 6h 30 !"

- "Je ne savais pas répondais-je. On ne m'a rien dit. Je suis parti avec mon mari qui       commence à 8h en réanimation"

Elles n'étaient pas au courant de ma venue.

Que faire d'autre que de se plonger dans le travail. Pourtant je m'étais présentée la veille dans ce service à l'infirmière, la cadre étant en repos. Les infos ne sont pas passées. Il y avait déjà eu précédemment d'autres renforts pourtant.

Mais bon ....

Moralement c'est difficile d'être reçu en ayant l'impression de déranger l'équipe dans le bon déroulement de leur soin. Quand même, nous venons les aider !

Heureusement j'aperçois une  personne au milieu couloir en train de servir les petits déjeuners. Je me présente  et aussitôt, souriant, il m'indique le vestiaire. Je m'habille en vert papier, et je retourne voir les autres aides-soignantes.

- "Tout est sur  le chariot et tu fais les toilettes des chambres suivantes."

- "D'accord."

- "Comment vous appelez-vous ?"

- "Guerda"

- "Et toi ?"

- "Marie-Neige."

- "Marie quoi ?"

J'ai l'habitude avec mon prénom....

- "Marie NEIGE comme la neige."

Silence.

Présentations mutuelles glaçantes, et fermées.

J'arrive et je travaille. ne connaissant rien du service avec aucune aide de personne.

Ma première impression  sur ce service est surréaliste.

Il fait très chaud, au moins trente degré dans les locaux. Pour pallier à cette situation puisque la clim est inexistante, l'habitude est de laisser toutes les portes et fenêtres grandes ouvertes. Il est courant de voir des feuilles des dossiers s’envoler !

Un courant d'air incessant rend supportable le travail dans cette situation. En déambulant dans les couloirs, j'aperçois les patients sont avachis sur leur lit, les bras et jambes ouvertes ,pour ventiler leur corps au travers des casaques en tissu coton ou en papier.

Certains d'entre-eux ont la chance que leur famille les dote d'un ventilateur. La chaleur humide est écrasante.

C'est surtout l'hygrométrie qui empêche l'évaporation de la sueur nous refusant cette impression de fraîcheur qui manque.

Revenons aux soins

Je n'ai aucune feuille de transmission, le vide total.

Donc mes acquis professionnels prennent le dessus, et je  rentre dans la première chambre.

Une dame en excès de poids (qui d'ailleurs malheureusement pour elle, est décédée le lendemain),  avait du mal à se mouvoir et pour qui je devais faire sa toilette. Elle avait fait un AVC et en plus le COVID. La tourner était très difficile sachant que je restais sans aide.

A peine dans la chambre la transpiration collais à mon dos avec cette tenue en papier hydrophobe, seule tenue accordée aux équipes de renforts sanitaires toute fonction  confondue.

De plus on y rajoute le tablier en plastique, les gants,  et enfin le masque. Il fait 33° et seul les courants d'air infligés par l'ouverture de toutes les portes  et fenêtres du services aident à supporter ces conditions de travail.

De plus les familles des patients doivent fournir ventilateur de confort, pack d'eau, serviettes de toilettes, et même les oreillers.

Étonnamment, pendant mes quinze jours de soins, sur les vingt lits de médecine polyvalente, il n'y a eu que six patients atteinds du COVID:

- 64 ans, diabétique

- 58 ans sans co-morbidité

- 81 ans cancer digestif et de prostate

- 66 ans,  sans co-morbidité

- 57 ans, excès de poids.

Ma présence en tant que renfort sanitaire a permis à une autre soignante de prendre du repos.

 

 

 

 

 

 

 

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